OBSCURAE LIBRARIUM

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mardi 11 novembre 2014

Chienne de Destinée (concours de nouvelles)



MARS 2014
N'ayant pas participé par manque de temps aux deux derniers concours des Lettres de Sang, je revins pour l'édition n°8. Le sujet était assez libre mais l'introduction plus précise.
Après avoir longuement hésité sur le sujet, j'optais pour un hommage à un des personnages de 40k que j'affectionne le plus: le Commissaire Ciaphas Cain.
Je n'ai pas obtenu le podium malgré de bons retours, obtenant la sixième place.
Les règles étaient les suivantes:

Et pour quelques cartouches de plus...:

une situation:
aucune particulière cette fois.
 Cependant, le maître de concours a donné l'instruction suivante concernant l'introduction imposée: "Les "chargeurs" sont adaptables à n'importe quel type de munition selon les races choisies (shurikens, tir à impulsion,  etc...) et selon la technologie utilisée (chargeurs pour munition à poudre, cellule énergétique pour laser, plasma,  etc...).

De même, le mot "masque" qui peut être compris comme un casque, heaume, visière etc..."
  
L'introduction du récit
"L'aube commençait à distiller sa teinte dorée à travers ce ciel encrassé par les gaz de combats, il respirait péniblement derrière son masque, tentant de reprendre un souffle voué à s'éteindre. Accroupis derrière un pilier ravagé par la mitraille adverse, il observait stoïquement la scène. Les ombres ennemies se faufilaient vers leur position mise à mal. La perspective d'une curée vengeresse donnait à ces chiens une audace répugnante. Le massacre avait duré toute la nuit. L'approvisionnement en munitions avait cessé il y à plus de deux heures, le laissant perplexe quant à l'état des lignes arrières. Plus aucune communication ni réponse n'était parvenue à son escouade en perdition. Son unité et lui étaient dangereusement isolés du reste des leurs, désormais les seuls à tenir cette section du front. Sa main engourdie par le combat ininterrompu se dirigea vers son dernier chargeur ...."

Ce fut mon dernier concours à ce jour sur le Black Librarium. par la suite j'ai poursuivi quelques écrits mais petit à petit je me suis éloigné du forum, mon temps bien vite bouffé par d'autres occupations. C'est à cette période que j'ai laissé en suspens mes nouvelles 40k, désireux de les améliorer. De même, c'est aussi peu après que j'ai posé les premières pierres pour mes deux projets de novellas SciFi et Médiéval Fantasy.

Liens du concours original:

Voici mon texte:




******************

CHIENNE DE DESTINEE:




L'aube commençait à distiller sa teinte dorée à travers ce ciel encrassé par les gaz de combats, il respirait péniblement derrière son masque, tentant de reprendre un souffle voué à s'éteindre. Accroupis derrière un pilier ravagé par la mitraille adverse, il observait stoïquement la scène. Les ombres ennemies se faufilaient vers leur position mise à mal. La perspective d'une curée vengeresse donnait à ces chiens une audace répugnante. Le massacre avait duré toute la nuit.
L'approvisionnement en munitions avait cessé il y à plus de deux heures, le laissant perplexe quant à l'état des lignes arrières. Plus aucune communication ni réponse n'était parvenue à son escouade en perdition. Son unité et lui étaient dangereusement isolés du reste des leurs, désormais les seuls à tenir cette section du front.
Sa main engourdie par le combat ininterrompu se dirigea vers son dernier chargeur. Il compta ses munitions, avec l'air maussade de l'homme pris au piège, aux portes de sa destinée, puis l'enfonça dans son pistolet bolter en maugréant.
Au loin, le grondement sourd de l'artillerie marquait la cadence d'une macabre mélodie à laquelle venaient se joindre les chœurs des mourants, les soli endiablés des décharges lasers et les cavalcades pétaradantes des lames tronçonneuses.

Sa destinée... Quelle drôle d'affaire! Combien de fois aurait il dû mourir, et combien de fois en avait il réchappé par un quelconque miracle. Était-ce l'Empereur? La bonne fortune? Le Warp?... Il n'en savait rien, et aujourd'hui n'en avait cure. C'était comme ça depuis le début, et il s'y était fait.
Même embourbé jusqu'au genoux dans une situation des plus déplorables, il avait survécu. Même lors des pires moments de son existence, il avait surmonté les épreuves pour en ressortir rayonnant.
Sa mère devait avoir passé un drôle de marché avec l'Empereur-Dieu pour lui avoir donné autant de chance, à moins qu'il s'agisse là d'un humour particulièrement mesquin de la part du Maître de l'Humanité, qui veillait sur lui comme aimaient à lui répéter ses plus fervents – et insupportables - admirateurs.

Il en avait encore les preuves ici, sur ces terres ravagées par la guerre, au sol labouré par les obus dont les seuls floraisons étaient désormais les entrailles des pauvres bougres qui s'étaient trouvés au mauvais endroit au mauvais moment.
La campagne pour la récupération de Sanderis Prime avait pourtant débuté sous les meilleurs auspices, les forces renégates en nombre relativement bas face au régiment dont il faisait partie. Les rebelles s'étaient directement attaqué au gouverneur, un homme aussi vif qu'une larve de mouche, qui mourut dès les premières heures de l'insurrection alors qu'il croyait à un bain de foule donné en sa gloire. La seule gloire qui lui fut donné pris la forme de cent cinquante grammes de plomb tirés à bout portant.
La cité tomba rapidement aux mains des révoltés, et le reste de Sanderis Prime suivit relativement vite.

Le hasard faisant bien les choses, son régiment était en transit, tout proche de la planète, et le Munitorum s'empressa de les dépêcher sur place pour prêter main forte aux derniers loyalistes qui tentaient de résister à la vague de blasphèmes déferlant sur leur patrie, tentative aussi fructueuse qu'un Ogryn essayant de comprendre les mystères de l'existence.
S'ensuivirent trente deux jours d'âpres combats qui purgèrent un à un les bastions rebelles, l'avancée se faisant avec autant de facilité qu'une lame tronçonneuse passée au travers d'une motte de beurre, pavant la route vers la victoire d'un tapis de cadavres suppliciés et de forteresses mises à bas.
Elle aurait dû être la dernière cité à tomber, elle fut la première à les repousser. Ce fut sanglant et sans pitié. En y repensant, il se demande bien comment le commandement avait pu se montrer aussi crédule et foncer tête baissée dans un tel piège. D'un autre côté, il fallait bien avouer que le succès - trop rapide - de cette campagne était sûrement monté à la tête des officiers avec la force d'un vieux cognac cadien.
Quoi qu'en fut la raison, le colonel n'attendit pas et donna l'assaut avec la même patience qu'aurait éprouvé une jeune recrue lorsqu'on lui remet son premier fusil laser standard en lui permettant d'en user librement. Et comme souvent dans ces cas là, le résultat est particulièrement douloureux.
En l’occurrence il fut affreusement meurtrier.

Les premières vagues de l'assaut s'écrasèrent littéralement sur des murs lourdement défendus par des cohortes de rebelles armés jusqu'au dents, et furent anéanties sans avoir put effectuer de percée satisfaisante.
Probablement agacé par un tel échec, et pressé d'en finir, le colonel pris la décision qu'il jugea la plus sage lorsqu'il constata une telle capacité de résistance: il ordonna une nouvelle charge.
Cette fois, les forces de libération purent percer les défenses adverses et pénétrèrent dans la cité à coups de lames, de tirs et d'un fort usage d'explosif. Si la cité avait été un être vivant, c'est comme si son poitrail venait subitement d'éclater.

Mais les insurgés tinrent bon, et contre attaquèrent avec cette insolence qui était devenu leur trait de caractère le plus évident. Le régiment éclata, chaque compagnie livrée à elle même, puis chaque peloton, puis chaque escouade. Une véritable débandade digne de la meilleur des stratégies de repli qui aurait été mûrement réfléchi par un Ork.
Les communications se firent sporadiques et les renforts de plus en plus difficiles à rejoindre. La nuit tomba rapidement sur une cité qui s'écroulait sur elle même, emportée par la furie des combats et un bombardement massif, deuxième décision sagement décidée par le colonel.

Il se remémorait sans peine la difficulté qu'il eut à joindre les bouts avec les autres escouades disséminées dans le labyrinthe de ruelles de la cité, une nuit noire ayant été jetée sur eux telle un linceul anticipé, la seule luminosité provenant des torrents de flammes vomis par les bâtiments dévastés.
Une chaleur étouffa rapidement la ville, et la progression devint des plus difficiles. Les ennemis étaient partout, en terrain connus, surgissant de leurs cachettes comme des diables moqueurs, pour se fondre à nouveau dans le décor en laissant derrière eux une masse de cadavres, dont les visages demeuraient crispés en une expression de morbide surprise. Du moins c'est ce qu'il constata avec dégoût lorsque son groupe parvint enfin à rejoindre une de leurs escouades perdues.

La bataille lui sembla durer toute une éternité, et plus d'une fois il crut à sa fin avant que sa chance insolente ne lui épargne à nouveau d'aller rejoindre la droite de l'Empereur pour converser avec Lui sur son sens de l'humour si particulier.
Poussé par sa notoriété qui lui collait à la peau comme un détestable parasite, il haranguait ses hommes pour les motiver dans leurs attaques, tout en essayant de se convaincre lui même avant tout. Et ils l'écoutaient avec dans les yeux l'espoir de se sortir de ce cauchemar vivants grâce à lui, et de se couvrir de gloire à ses côtés, le sabre au clair et la prière aux lèvres.
Il avait souvent été tenté de les laisser faire, de les laisser partir en avant, tandis que son esprit calculateur cherchait une solution plus viable pour se tirer de ce merdier sans nom. Mais à chaque fois des tirs hostiles claquèrent et le ramenèrent docilement au sein du rang pour endosser à nouveau son rôle d'icône de motivation.

Bien sûr il haïssait l'ennemi pour ce qu'ils étaient, pour l'affront qu'ils représentaient et la honte qu'ils jetaient sur l'Imperium en tournant ainsi le dos à leur Empereur. Mais il ne pouvait s'empêcher de maudire les hommes qui le suivaient partout, tel un rappel cinglant du rôle honteux que son insupportable chance l'avait forcé à adopter. Il ne pouvait s'empêcher de détester leur stupide résolution à aller mourir en chantant pour la gloire d'un Imperium qui au final n'avait pas grand chose à faire d'eux du moment qu'ils menaient leur tâche à bien. Il ne pouvait s'empêcher de songer à leur crier de se débrouiller sans lui et d'aller mourir où bon leur semblait avec comme seul ordre strict et non négociable de le laisser en paix.
Et à chaque fois qu'il se tournait vers eux pour les envoyer paître, il voyait ces visages sereins, sérieux et confiants tout à la fois qui le considéraient en attendant son prochain ordre. Et il ne pouvait alors que leur indiquer leur prochain mouvement en cachant à grand peine sa lassitude.
Le maudit dans l'histoire, c'était lui, et lui seul.

Laissant là toute pensée amère, et refoulant son énervement le portant à la frontière si mince entre être un soldat aimé et être un hérétique qu'on transforme en descente de lit, il jeta à nouveau un regard vers les positions ennemies révélées par l'aube naissante, un réseau de bunkers de fortune et de tranchées davantage creusées par l'artillerie impériale que par des bras renégats. Tout autour s'étalaient des monticules de corps désarticulés, étalés aux quatre vents par les tirs haineux des hérétiques qui, goguenards malgré la promesse d'une fin de vie face à un peloton d'exécution – dans le meilleur des cas, ne cessaient de hurler leurs blasphèmes et leurs défis, injuriant, crachant et se moquant des gardes perdus au milieu de cet enfer de destruction.
Quelques imbéciles mordaient parfois à l'hameçon, se jetant à l'attaque dans un cri inarticulé dans un désir de rendre justice à l'Imperium à eux tout seuls, espérant incarner la divine colère de l'Empereur en abattant toutes ces ordures, pour attendre leur récompense sur une montagne de cadavres.
Généralement, les seules médailles qu'ils recevaient étaient alors plusieurs cratères sanglants en travers du torse, ou alors ils avaient l'infâme honneur de sauter non pas vers une gloire infinie, mais sur une mine dissimulée entre deux morceaux de leurs prédécesseurs.
Ca et là cependant, il avait tout de même la satisfaction de distinguer les restes de renégats trop sûrs d'eux et que son escouade et lui avaient très justement corrigés en leur attribuant leur propre version d'ornementation et de récompenses.

Il jeta un regard interrogateur à son officier radio, espérant que les transmissions aient reprises, promettant leur lot de renforts, de ravitaillement et de perspectives d'en finir avec cette boucherie grand-guignolesque, mais la seule réponse qu'il reçut fut un lent "non" de la tête et le soupir synchronisé poussé par le reste de l'escouade.
Ils étaient coincés, et la seule alternative de sortie ne lui plaisait pas du tout, les récompenses promises n'étant pas du tout de son goût comparées à celles qu'il recevait habituellement.
Mais il semblait bien qu'ils n'aient guère le choix que de rebrousser chemin au risque de se perdre toujours plus loin en territoire ennemi, ou tenter leur chance en prenant d'assaut cette position offrant une bonne protection, même provisoire.
Peut être même des rations et une radio en état de fonctionner...

Une odeur détonna parmi le florilège de senteurs typique de la guerre, mélange subtil de fycelène, de fumée, de sang et autres fluides corporels tout aussi répugnants, et il se retourna en reconnaissant sa fidèle ordonnance surement venu le ramener à la réalité à l'aide de ses conseils aussi subtils qu'un xenomorphe tyranide, et ses émanations corporelles qui auraient suffit à tuer ce même xenomorphe.

"Alors, qu'est ce qu'on fait maintenant? On fonce?" demanda ce bouquet d'arômes vomitifs.
"A-t-on un autre choix, et par la Grâce de l'Empereur réponds moi par l'affirmative."
L'ordonnance haussa les épaules avec une expression aussi préoccupée que celle d'un serviteur au repos. La réponse était évidente.
"Je crois bien que non, Commissaire. Va falloir tenter le coup." dit l’ordonnance.
"Je déteste vraiment quand tu dis ça, Jurgen..." grogna-t-il en réponse.

Il se leva alors et ramena son épée tronçonneuse à la vie, en refluant au plus profond de lui son envie subite de prendre ses jambes à son cou et détaler d'ici en souhaitant bonne chance aux pauvres bougres qui attendaient ses ordres.
Ces derniers furent bel et bien ceux qu'il se refusait depuis le début à prononcer.

"En avant, sus à l'ennemi! Pour la Gloire de l'Imperium!" cria Ciaphas Cain en ouvrant le feu vers la position ennemie, se ruant avec ses hommes.
Toujours plus loin.
Vers les portes de sa destinée.
Sa chienne de destinée... 

Serment Éternel (concours de nouvelles)



AOUT 2013
Ce concours ci fut semé d'embûches et de précipitations, et fut à mon sens le texte le plus bâclé. Au vu des retours, il semble qu'il ait tout de même plu, bien qu'il fut l'un des seuls à avoir fait un écart conséquent avec le fluff cannonique de 40k, faute de connaissances approfondies sur le sujet que j'ai choisi. 
Sur ce concours, j'ai obtenu la troisième place.
Les règles étaient les suivantes:

Triomphe d'Ullanor et d'Horus Lupercal:

une situation:
aucune spécifiée cette fois
L'introduction du récit
"L'obscurité ...
Le froid ...
Le temps qui s'égraine comme du sable s'écoulant lentement du sommet d'une dune ....
Voilà ce qui caractérisait l'endroit.
En son centre, un être ...
Seul ...
Maintenu par des liens qui l'entravaient ...
Soudain la lumière transperça l'obscurité. Une ouverture apparut dans la paroi lui faisant face.
Une silhouette se dessina dans la clarté ..."

Au moment où le concours débutait, j'avais du boulot par dessus la tête: réorganisation totale d'Obscurae Librarium (mon forum roleplay 40k), retard à rattraper sur mes écrits de l'époque, autre concours de nouvelle hors 40k pour Novembre (en coécriture) finalement avorté, le boulot... bref, c'était tendu!
Au lancement du concours, en pleine lecture alors de la trilogie Eisenhorn, fin du tome 2, je me suis dit "génial! le sujet est tout trouvé! ce sera une entrevue des années après entre Eisenhorn et Pontius Glaw". Le sujet me plaisait et j'avais déjà pratiquement établi toutes les bases. ... Loupé! Je finis le tome 3, et je vois mon occasion s'envoler avec la résurrection et la mort de Glaw. 
Tout à recommencer!
C'est là que je songe, quelques temps après, alors à Malcador le Sigilite qui rend visite à l'Empereur juste après son incarcération et la déroute des armées d'Horus sur Terra. Le truc sympa où il s'adresse à un "légume", voyant là un vieil ami tombé, et se remémore les bons vieux temps (on s'égarerai sur la Grande Croisade, les Guerres d'Unifications, etc...des références en veux tu en voilà), jusqu'à arrivée de Dorn ou d'un custodien pour annoncer la totale défaite des légions renégates qui sont reparties de Terra et le début des purges qui suivront. En gros le truc de "une page se tourne, faisons le point!"
J'apprends un peu plus sur le funeste destin de Malcador finissant grillé peu avant que l'Empereur soit incarcéré! 
Tout à recommencer!
Pris par le temps (on est à une semaine de la fin), ayant été retardé par mon planning sur Obscurae, je réfléchis à toute vitesse, garde l'idée de la salle du Trône, et ponds ce texte, certes un peu à la va-vite, sans plus me renseigner sur le fluff exact.
J'imagine donc Dorn après sa longue et éreintante dispute avec ses frères pour refuser le Codex en venir à la dernière solution désespérée d'aller "rendre visite" à son Père, espérant un "miracle", Guilliman l'y retrouvant pour lui faire comprendre qu'il ne peut qu'accepter (j'en profite même pour glisser en référence deux citations connues à la fin, en les attribuant à leurs auteurs dans un contexte particulier).
Bon effectivement, après recherches à tête reposée, la réalité "canon fluff" est un peu plus violente, surtout sur la fin... 

Liens du concours original:

Voici mon texte:




******************

SERMENT ETERNEL:


L'obscurité ...
Le froid ...
Le temps qui s'égraine comme du sable s'écoulant lentement du sommet d'une dune ....
Voilà ce qui caractérisait l'endroit.
En son centre, un être ...
Seul ...
Maintenu par des liens qui l'entravaient ...
Soudain la lumière transperça l'obscurité. Une ouverture apparut dans la paroi lui faisant face.
Une silhouette se dessina dans la clarté. Un géant aux pas lourds, dont l'aura éclatante paraissait pourtant diminuée, pâle, presque fuyante. Même son armure jadis irradiant de mille feux semblait ternie.

Un instant, la silhouette du colosse s'arrêta dans l'embrasure de l'immense ouverture, laissant un regard vide errer dans ces lieux obscurs où le temps semblait s'être dignement arrêté, comme pour respecter ce qui s'y trouvait.
Seul un doux vrombissement troublait le silence funèbre, tel le murmure d'une profonde cascade souterraine, et l'air avait un léger goût d'ozone.
Mais tout le reste empestait la mort et la douleur.

Le plafond de la salle plongée dans l'obscurité ne pouvait être aperçu, et le sol était dissimulé sous une couche cotonneuse d'un brouillard irréel, nuage spectral errant au gré des quelques courants d'air frais, le faisant ressembler à une légion de fantômes se mouvant et se tordant dans les affres de leur éternelle agonie.
Parfois, un bras nuageux s'étirait suffisamment pour révéler un sol d'acier noir sur lequel serpentaient une multitude de câbles épais, certains parcourus de timides clignotements de lumière. Tous rejoignaient le dispositif central qui s'élevait tel une terrible cage sur laquelle était entravée l'être impassible, immobile, figé dans une contemplation fugitive, ses yeux vitreux tournés vers un univers que lui seul pouvait voir.
Autour de son corps immobile chatoyait une aura à peine décelable.

Le géant laissa échapper un long soupir dans lequel se mêlaient sa douleur et son désespoir, son souffle résonnant en écho gémissant dans la vaste salle. Il avança d'un pas et des silhouettes invisibles derrière lui fermèrent les deux lourds battants de ce qui ne pouvait être décrit que comme une crypte.
L'obscurité englouti à nouveau la salle, et le colosse fut plongé dans les ténèbres qui étouffèrent complètement le rayonnement qui émanait de lui plus que de son armure de feu.

Il fit quelques pas vers l'imposante structure lui faisant front, d'une démarche erratique, comme un objet céleste prit dans le champ gravitique d'un soleil mourant, son regard gris emplit de tristesse fixé sur l'être immobile vers qui il se dirigeait.
Ses deux énormes mains enserraient un long objet enroulé dans un drap de soie pourpre qu'il présentait solennellement devant lui.

Arrivé au pied de la structure s'échappant du nuage de vapeur au sol, il put entendre un peu mieux le vrombissement incessant produit par la machinerie ésotérique permettant au dispositif de fonctionner, de même qu'il sentit sa peau se tendre sous l'effet d'une obscure énergie qui irradiait de ce lieu, l'être immobile étant l'épicentre de cette tension invisible et impalpable.
Son regard se perdit vers le sol brumeux tandis qu'il posait le pied sur la première des marches menant au prisonnier impassible, et ses yeux accrochèrent les vestiges d'un tas de poussière noire, encore incrustés dans le dallage d'acier.
Son coeur se serra lorsqu'il se remémora l'âme exceptionnelle qui avait péri là, offrant ses dernières étincelles de vie dans un sacrifice ultime pour permettre à son maître de subsister quelques instants encore, avant de s'évanouir en un nuage de cendres.
L'être doré se rappellera tout au long de son auguste existence le cri d'agonie emprunt de déférence qui s'échappa du martyr tandis que son corps brisé retournait à la poussière.

Il secoua la tête pour chasser de son esprit la douleur de ce souvenir, et grimpa les dernières marches le menant vers l'être immobile, sentant son corps et son âme crouler de plus en plus sous l'effet de la tension écrasante qui régnait au sommet.
Il fit enfin face au personnage légendaire qui trônait en haut de sa prison, et porta un genou à terre en courbant la tête, laissant une larme rouler sur ses joues creusées de cicatrices et de rides. Il éleva ses mains au dessus de sa tête, dévoilant l'objet majestueux qu'il avait amené avec lui. Il posa avec les plus infimes précautions une épée étincelante sur les genoux de l'être le surplombant, puis releva son visage tremblant d'une profonde tristesse pour contempler le visage fermé du propriétaire de l'arme.

Celui ci ne bougea, pas plus qu'il ne le remercia pour lui avoir retourné son arme fidèle, désormais aussi éteinte que lui.

Après un moment de recueillement, le géant ramena une de ses mains sur son coeur, fermée en un poing, l'autre demeurant sur l'arme endormie.
Sa voix grondant comme un orage lointain brisa le silence devenu maître depuis que l'être le plus puissant de la Galaxie eut prononcé ses derniers mots ici même.
"Les temps sont devenus bien sombres sans toi pour nous guider." dit-il. "Mes frères et moi t'avons pleuré, plus encore que nous avons pleuré nos frères tombés et la trahison qui nous a dévoré."

Il se tut un instant, fermant les yeux alors que la douleur cuisante des récents événements s’imposaient une fois encore à sa mémoire. Des événements qui avaient changé le cours de l'Histoire de manière irrémédiable, et qui en entraînaient d'autres, tout aussi terribles.
Il s'accorda un moment avant de poser à nouveau son regard gris sur l'être devant lequel il s'était agenouillé.
"J'ai besoin de toi, de tes conseils, de ton autorité. Nous tous en avons besoin."

A nouveau, il se tut, tout en se préparant à confier le tourment qui le rongeait et qui justifiait sa visite.
"Mes fils... Il veut me les enlever. Les briser en morceaux, les diviser. Ils sont légions, t'ont servi jusqu'au bout, avec ferveur et amour. Et il veut les séparer. Briser cette fraternité. Briser ce lien unique. Il a peur..."
Il posa son autre genou à terre, dans une posture de supplique désespérée, et posa à nouveau ses deux mains sur l'épée qu'il avait amenée.

"Il m'appelle hérétique! Il n'accepte pas mon refus, et le compare à la trahison de nos frères mille fois maudits! Mes fils! Ma chair! Il veut les séparer... Que dois je faire? N'a-t-on pas eu assez de conflit fraternel? Le sang n'a-t-il pas assez coulé qu'il faille le répandre à nouveau pour défendre ses fils et son honneur?"
Il implora l'être du regard, espérant un réponse qui ne vint pas, car sa bouche était immobile et ses yeux perdus dans le vague.

"Père! Je t'en prie, réponds moi! Aide moi!" supplia le colosse, sa voix gonflée par le désespoir grondant comme un coup de tonnerre dans la salle.

"Il ne peut te répondre, tu sais..." lança une voix puissante derrière lui. "Mais il t'entends, sois en sûr."
Le colosse doré se releva d'un bond, se tournant avec colère vers celui qui était venu briser son entrevue.
"Roboute.." siffla-t-il, sa rancoeur prenant le pas sur sa tristesse.
"Mon frère." répondit celui ci en s'avançant vers lui, levant une main apaisante. "Je t'en prie, cesse cette folie.
-Je ne te laisserai pas prendre mes fils!" aboya le géant en levant un poing rageur.  "Nos frères ont peut être accepté la honte que nous portera tes édits, mais pas moi! Nous devons demeurer ensemble, comme depuis toujours, pour protéger notre père des manigances de l'ennemi! Je ne laisserai pas mes fils se détourner de notre croisade, pour se faire fragmenter de la sorte! Je demeurerai avec eux tous, pour continuer notre croisade, pour me racheter à ses yeux! Pour traquer et punir chacun de nos traîtres de frères comme nous aurions dû le faire dès le début!
-Rogal! "le coupa Guilliman, sa voix claquant comme la foudre.
Rogal Dorn sembla frappé de plein fouet, et s'interrompit dans sa diatribe, laissant son frère s'avancer vers lui, sa voix retrouvant son calme.

"Cesses donc de te blâmer pour tout, je t'en prie mon frère." fit ce dernier en parvenant face à Dorn. "Blâme Horus, blâme Angron, Fulgrim, Mortarion et les autres, mais pas toi. Tu es pur de coeur, et a toujours été fidèle à notre père. Je le sais, et nous le savons tous. Il n'y a que toi qui semble l'oublier. De nous tous tu a toujours été celui qui s'est tenu au plus près de lui pour le défendre.
-Et j'ai échoué!" gronda Dorn avec colère. "J'eus préféré mourir à la place de Sanguinius plutôt que de faire face à tel déshonneur!
-Entends tu la folie de tes paroles?" le coupa à nouveau Guilliman avec véhémence. "Crois tu que de telles paroles rendront honneur au sacrifice de notre frère? Crois tu que tu sers les intérêts de notre père par une telle mortification aveugle et égoïste? Retrouves tes esprits, frère! Cesse donc ces inepties! Crois tu que Corax s’apitoie de la sorte alors que sa légion demeure pratiquement en voie d'extinction?"

L'argument toucha, et Rogal Dorn baissa la tête, presque honteux. Après un instant, il consentit à descendre les marches de la structure pour rejoindre son frère. Ce dernier lui posa la main sur l'épaule, et le regarda droit dans les yeux.
"Il ne s'agit pas de te punir, il ne s'agit pas de punir aucun de nos frères. Il s'agit d'une nécessité. Il s'agit de l'avenir de l'Imperium.
-Je ne peux te laisser briser mes fils en morceaux.
-Serais tu donc prêt à apporter un nouveau conflit fratricide par ton refus? Est-ce ce que tu désire par ton entêtement?" insista doucement Guilliman.
Dorn ne dit rien pendant un long moment, rongé par l'inquiétude, la douleur et son sentiment de culpabilité.
Puis il releva la tête, et son regard se fit dur et résolu.
"Non, bien sûr que non." dit-il. "J'accéderai à ta requête, et les Imperial Fist adopteront les valeurs de ton Codex, même si je t'exprime à nouveau ma désapprobation et ma colère face à une réorganisation aussi honteuse de nos glorieuses légions.
-Et j'entends ta protestation, frère.
-Mais je le jure ici, devant toi, et devant notre père. Plus jamais les Imperial Fist et leurs descendants ne failliront devant l'Empereur. Notre croisade sera éternelle et nous ne trouverons nul repos alors que battent les coeurs de nos vils ennemis."

Son serment prononcé, Rogal Dorn se tourna un instant vers la figure immobile de son père, puis sortit de la salle sans regarder en arrière.
Roboute Guilliman le regarda partir, puis ferma les yeux avant de les rouvrir sur le Trône d'Or. Il courba la tête avec respect et déférence.
"Quelle que soit votre volonté, père, je vous en prie faites en sorte que Rogal la connaisse. Lui, plus que nous tous, en aura besoin."

Puis à son tour, le Primarque des Ultramarines sortit de la crypte, et referma les lourds battants.
L'Histoire de l'Imperium, et de la Galaxie toute entière était une fois de plus en train d'être écrite.
Mais, incarcéré sur son Trône d'Or, l'Empereur aimé de tous n'y prendrait plus part désormais...

Etoiles Filantes (concours de nouvelles)





MAI 2013
Après ma cinquième position lors du concours précédent, j'ai à nouveau participé aux Lettres de Sang. Cette fois le concours proposait une scène bien plus vaste avec possibilité multiples en matière d'action. 
J'ai finalement opté pour un simple humain comme acteur, désireux de mettre en avant la cruauté du 41ème millénaire vue par les yeux d'un simple citoyen, goutte d'eau parmi un océan de mortels dans cet univers où ne règne que la guerre.
J'ai obtenu pour ce concours la deuxième place, l'idée ayant fortement plu. Le gagnant cependant m'a bluffé par un texte ayant amené un dénouement façon cliffhanger qui m'a forcé le respect.
Les règles étaient les suivantes:

"Ils arrivent...":

une situation:
"Lieu : système de Talia.
Composition : 4 planètes et 3 lunes majeures.

Illiya : monde de type désertique. Atmosphère respirable.
Talia : principale planète du système du même nom. Monde au climat semblable à la Terra d’antan. Recouverte à plus de 60% de terres immergées et de jungles tropicales.
Bluerith : Une lune aquatique parsemée de rares îles.
36.2 :  *archives sous scellé inquisitorial*
Zuminar : monde au climat polaire. Deux lunes jumelles, Rio et Mio, ressources minières d’intérêt.

++Fin du Rapport++

En attente d'instruction..."
L'introduction du récit
"Ils arrivent ... La mort se fait sentir à chacun de leur pas. Ils arrivent... Dans la pâle lumière du soleil couchant ... Ils arrivent"

Au départ, je m'étais penché sur cette même idée mais vue par les yeux de Space Marines venus purger ce système, ce afin de pouvoir évoquer les autres mondes. Mais j'ai trouvé au final plus intéressant de parler de cet événement au travers des yeux d'un pauvre citoyen innocent. Notamment pour cyniquement soulever que par moments dans ce sombre millénaire, les innocents étaient malmenés par les ennemis de l'Imperium mais parfois aussi par l'Imperium lui même, étant des denrées sacrifiables parmi des milliards d'autres.

Liens du concours original:

Voici mon texte:




******************

ETOILES FILANTES:


"Ils arrivent... La mort se fait sentir à chacun de leurs pas. Ils arrivent... Dans la pâle lumière du soleil couchant... Ils arrivent." Le graffiti s'étalait sinistrement sur le mur délabré, ses traits à moitié effacés par le temps et les combats. 
Au sol, ratatiné au pied de la paroi, gisait un cadavre brisé, la peau tannée et momifiée par le vent glacial de Zuminar, les traits du macchabée figés pour l'éternité en une expression d'intense souffrance. Sa main squelettique tenait toujours une canette de peinture depuis longtemps corrodée, reposant sur sa poitrine éclatée, ses côtes s'ouvrant comme les ailes d'un macabre volatile.

Tremblant à cause du froid et de l'appréhension, le citoyen impérial portant le nom d'Haster Tuvius était recroquevillé contre un tas de gravats, juste à côté du corps sans vie qu'il fixait d'un regard vide. Le pauvre type avait dû être surpris par les licteurs noirs alors qu'il peignait les sombres mots sur le mur de ce qui avait été jadis un bâtiment de l'Administratum, tandis que la cité était envahie. 
Sa mort avait de toute évidence été lente et abominable, Haster savait depuis les premiers jours comment agissaient les milices de leur oppresseur. Il avait vu les affreuses exécutions publiques bien trop de fois, forcé par l'envahisseur à regarder mourir des gens innocents, parmi lesquels il avait compté bien trop d'amis et de proches. 
Mais l'horreur finit par durer assez longtemps pour émousser ses émotions et le rendre insensible à son sort et à celui des autres.
Il fallait se rendre à l'évidence. L'Empereur avait détourné Ses yeux de Zuminar depuis bien trop longtemps pour que quiconque puisse garder espoir.

Cela faisait trois ans que les sombres cohortes du Magister avait foulé de leurs pieds le sol enneigé de Zuminar, mettant chacune de ses villes à feu et à sang, prélevant des millions de vies en tribut à leurs divinités exécrables, faisant tant couler le sang que la neige avait pris une teinte ferreuse sur bien des endroits. 
Les bourgades paisibles avaient été pillées, ses bâtiments rasés, ses habitants jetés dans les mines,  torturés ou laissés mourir de froid et de faim, pour le plus grand divertissement de l'ennemi. 
De gigantesques gibets avaient fleuris un peu partout comme une immonde plante parasite dont les fruits tombant en grappe étaient des dizaines, des centaines de malheureux sacrifiés à des dieux sanguinaires. 
Le vent charriait une odeur de mort et de désespoir et ses mugissements stridents se mêlaient aux râles d'agonie de milliers d'âmes en peine attendant que vienne leur tour d'être immolé sur les obscènes autels de l'envahisseur.

La citadelle de glace, autrefois une fière forteresse répandant la splendeur impériale sur les régions glaciaires de Zuminar, avait été prise comme foyer par le Grand Ennemi, désacralisée et profanée de telle façon que nombreux furent ceux et celles à préférer mettre fin à leurs jours plutôt que de supporter cet horrible spectacle. 
Le gouverneur planétaire et tous les officiels impériaux avaient étaient torturés en public durant des jours avant d'être laissés sur l'échafaud, condamnés à lentement mourir gelés. Leurs carcasses rabougries y étaient toujours, trois années d'horreur après. 

Le temps passa affreusement lentement, comme si par leurs sombres maléfices, les sorciers qui les avaient asservis avaient enfermé Zuminar dans un espace temporel différent. Haster avait depuis vu suffisamment d’aberrations pour pouvoir croire à une idée si folle.
Réduit comme tous les autres en esclavage, il avait trimé pendant toute une année dans une mine pour le compte de ses nouveaux maîtres, avant que ceux ci, lassés de leurs jouets, ne les rejettent hors de l'installation lorsque celle ci fut vidée de tout son minerai. 
Les licteurs noirs arrivèrent, dans leurs manteaux plus sombres que la nuit, avec leurs masques de métal grimaçant et leurs griffes depuis longtemps oxydées par tout le sang qu'elles avaient fait couler. Ils étaient des centaines, et par une terrible soirée ils fondirent sur les bidonvilles de l'installation minière pour massacrer tout le monde. 
Si l'air glacial de son monde n'avait pas gelé presque instantanément les torrents de sang qui avaient été versés, Haster était sûr qu'ils auraient pu noyer la mine toute entière, comme un lac souterrain rubicond.
Par chance - ou peut être par malchance, il ne savait même plus quoi en penser – Haster était parvenu à fuir avec une poignée d'esclaves pour rejoindre comme un rat les ruines de la cité, à moitié ensevelie par la neige, les arrêtes de ses bâtiments perçant timidement le manteau blanc comme des bris d'os pointant au travers d'une vilaine blessure.
Le blizzard eut raison de certains d'entre eux, Haster et les survivants se terrant dans les décombres comme de la vermine, obligés de trouver tout et n'importe quoi pour subsister, des ordures jusqu'aux cadavres congelés.

Rendu presque fou par ces conditions abominables, le fugitif avait progressivement abandonné tout espoir, délaissant ses congénères dont beaucoup étaient pour ainsi dire revenus à l'état sauvage, cannibales aux grognements inintelligibles, nouvelles créations impies de l'ennemi. 
Haster pour sa part s'était désespérément accroché aux dernières bribes de raison qui lui restaient, mais plus les jours passaient, et plus celle ci s'étiolaient, le faisant errer hagard dans le cimetière qu'était devenu son monde.

Comment il en était venu à se retrouver aux côtés de ce cadavre anonyme, il ne le savait plus, tout comme il ne savait plus depuis longtemps quel but il poursuivait. Les sombres puissances qui enserraient Zuminar de leurs griffes hérétiques avaient fini par obtenir ce qu'elle recherchaient, arrachant à leurs victimes leur humanité, sans même avoir besoin de les convertir au terme d'une éternité de tortures sur la grand place.
Haster ne savait plus en quoi croire, il ne savait même plus qui il était vraiment, à part un cadavre ambulant attendant que sa patrie ait pitié de lui et n'embrasse son corps meurtri de son étreinte glaciale pour que son âme puisse connaître enfin le repos. Mais même Zuminar semblait s'être détournée de lui, puisqu'il errait toujours comme un fantôme, survivant à sa misérable fuite depuis un temps incalculable.

Ruminant ces amères pensées, pour la première fois depuis ce qui lui semblait une éternité, Haster se mit à pleurer, ses larmes gelant aussitôt qu'elle commençaient à rouler sur ses joues creusées. Il se recroquevilla un peu plus, resserrant les quelques haillons qui lui restaient pour protéger sa silhouette de mort vivant des morsures du vent impitoyable.
Le soleil commençait à décliner, et au travers des bourrasques de blizzard enneigé, on pouvait déjà apercevoir les lunes jumelles, Rio et Mio, dont le contact avait déjà été perdu quelques jours avant l'invasion.

Dans le ciel, il put entrapercevoir les étoiles scintillantes qui commençaient à apparaître, et il lâcha un soupir secoué de sanglots, prêt à donner n'importe quoi pour se trouver sur l'une d'entre elle, n'importe laquelle, plutôt que de demeurer dans cet enfer.
Il put voir certaines d'entre elles se mouvoir en traits blancs, comme une flèche céleste décochée vers son monde profané. Il repensa fugacement à une vieille légende de Terra qui voulait que l'on fasse un vœu à la vue d'une étoile filante, mais il n'avait même plus la force d'en formuler un avec assez de force pour croire qu'il allait se réaliser. Il voulait seulement être libéré de ce cauchemar.

La pluie d'étoiles filantes s'intensifia, de plus apparaissant, certaines produisant un sifflement anormal, accompagnée d'un lointain grondement, qui lui même finit par se clarifier en une symphonie discordante de coups de tambours abyssales et de craquements de tonnerre.
Intrigué, Haster s'aida du mur en ruine pour se relever en tremblant de plus belle alors que le vent froid s'insinuait dans les vestiges de ses vêtements. Il tendit l'oreille, et son ventre se noua un peu plus alors qu'il reconnut le fracas caractéristique de la bataille. 
Encore un raid des phalanges du Magister? Ou bien un nouvel acte désespéré de la résistance?
Il se mit à ramper en quête d'une terrier où se cacher, son instinct de survie prenant le dessus sur sa raison, dans une volonté dérisoire de prolonger un peu plus sa triste existence, car il savait que rester là signerait sa perte si les combats se portaient jusqu'à lui.

Soudain il se figea, après seulement quelques pas hésitants, discernant dans le brouillard neigeux de vagues silhouettes s'avançant dans sa direction, leurs pas résonnant lourdement. Il fut saisi de terreur lorsque se détachèrent du voile un groupe de quatre géants en armures grises, couvertes de trophées et de fourrures, leur faciès évoquant un masque de mort furieuse, leurs mains enserrant des armes de destruction totale. Leurs poitrines de fer arboraient chacune l'aigle impérial, et sur leurs épaules grognait un loup en chasse.

Il tomba à genoux alors que se révélaient à lui les Loups de l'Empereur, et ses yeux inondèrent ses joues de larmes de glace tandis qu'il rendait grâce à l'Empereur d'envoyer ses Anges libérer Zuminar. 
Trop choqué par cette vision bénie, il n'entendit même pas l'un d'eux qui s'adressa aux autres d'une voix d'outre tombe: " Suivez le protocole, ce monde est perdu. Purifiez le corrompu.". 
Il était encore en train de se répandre en prières et remerciements vains alors que les géants levaient leurs armes sans plus de cérémonie.
Son corps sursauta quand il fut arraché du sol par une courte rafale, et s'écrasa, brisé, aux côtés du tagueur anonyme.

Les yeux mourants d'Hatser Tuvius accrochèrent une nouvelle fois le graffiti et ses mots prophétiques, et un vague sourire se fit sur ses lèvres ensanglantées.
Au delà du mur, la dernière chose qu'il vit de ce monde furent les étoiles filantes qui pleuvaient de plus en plus nombreuses.
Son voeu était exaucé. Il était libéré.